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  • Photo du rédacteurDavid SCHANGEL

Quelle cohabitation pour les voies ferrées ?

A l’heure actuelle, seules deux lignes haut-rhinoises sont en sommeil sans pour autant être démantelées ni menacées à court terme par une procédure de déclassement : Colmar – Ensisheim et Bollwiller – Guebwiller. Dans le deuxième cas, ce coma pourrait ne plus durer bien longtemps, puisque la procédure de réouverture, poussée par la Région et sous l’impulsion de l’association FloriRail (dont je vous invite à visiter le site ici), suit son cours. Aux toutes dernières nouvelles, des forages doivent avoir lieu dans le mois à venir. Ils auront pour but d’étudier la nature des sols au passage de la RD 83 (ancienne nationale 83, aujourd’hui route à quatre voies) et, de facto, de déterminer le type de passage le plus pertinent permettant à la voie ferrée de franchir la route. Le projet de réouverture est donc sur les rails, et prêt à arriver à son terminus, Guebwiller.


Pourtant, le projet ne fait pas que des heureux. Plusieurs voix se sont élevées contre la possibilité de revoir circuler des trains dans la vallée. Des raisons souvent fantaisistes sont évoquées, sur lesquelles je ne m’attarderai pas. Parmi les opposants à la réouverture de la ligne du Florival, de nombreux riverains occupent des quartiers adjacents à la voie. Les habitants de la Winkelmatt, dont le quartier a été érigé au milieu des années 1970, n’ont pour la plupart pas connu la ligne au temps des nombreux autorails quotidiens qui reliaient Bollwiller au fin fond de la vallée. Seuls deux souvenirs ont pu majoritairement subsister :

  1. celui du « train omnibus marchandises » ayant desservi la ligne une fois par jour au maximum ;

  2. celui d’une ligne désaffectée que l’on a rendu à la nature.


Difficile alors, avec un manque d’informations et une vision parfois biaisée du « petit chemin de fer à papy », de ne pas éprouver une forme d’inquiétude vis-à-vis d’un moyen de transport susceptible de perturber la tranquillité d’un environnement. Une inquiétude qui, d’un sens, semble tout à fait compréhensible. Ceci étant écrit, certaines informations sont à rajouter pour avoir une vision objective. Je ne développerai pas les arguments posés en faveur de la réouverture (aspects environnementaux, sociaux, économiques…), qui sont nombreux et très bien développés par l’association FloriRail. Ici, seuls deux points m’intéressent en particulier : l’aspect technique (c’est-à-dire le type de matériel choisi) et les considérations géographiques.


Aspect technique : le choix du tram-train

Avec la directive Bussereau établie en 2008, la réouverture d’une ligne comportant des passages à niveau est fortement déconseillée. De nombreux projets se voient bloquées au pire, freinées au mieux. A Guebwiller, une solution déjà envisagée dans les années 1990 par FloriRail, qui n’en était alors qu’à ses débuts, apparaît comme étant la seule viable. A ce moment, les arguments environnementaux était en particulier mis en avant. Avec la mise en service du tramway de Mulhouse puis du tram-train de Mulhouse à Thann et la possibilité d’une mise à disposition du matériel pour d’autres dessertes, la réouverture est presque servie sur un plateau d’argent. Les inquiétudes avancées par les riverains à la voie ferrée sont rapidement balayées d’un revers. Avant la directive Bussereau, les études de faisabilité préconisaient l’utilisation d’un matériel de type X 73500 sur la ligne du Florival. Cet autorail était (et continue de l’être) réputé pour être assez bruyant. Mais qu’en est-il des rames de tram-train (Siemens Avanto U 25500) ?


A chacun d’en faire son avis : https://www.youtube.com/watch?v=4BP5J8_gpU0


Il s’avère qu’à une certaine distance, les nuisances sonores se révèlent (quasi) inexistantes, dans l’absolu et en comparaison avec les X 73500. Elles sont, en outre, moins bruyantes que le passage constant de véhicules routiers, qui ne sont pas soumis à des contraintes horaires.


Aspect géographique : les « villages champignons »

Pourquoi parler depuis le début de cet article de la ligne de Bollwiller à Guebwiller pour un site consacré à la ligne Colmar – Ensisheim ? La raison réside dans le problème du voisinage entre la voie ferrée et les habitations, ou plus précisément les nouvelles habitations. Les villages de la Hardt sont encore plus concernés par cette problématique. En effet, depuis les années 70 et plus particulièrement ces vingt dernières années, le chapelet de communes autrefois desservies par la ligne connaissent une forte croissance démographique, due à la construction quasi ininterrompue de lotissements en périphérie des « vieux villages ». Entre le milieu des années 2000 et le milieu des années 2010, la population a augmenté en moyenne de 25 %, avec certains cas spectaculaires comme celui de Niederentzen, dont la population a tout simplement doublé (709 habitants en 2015 contre 358 dix ans plus tôt). Un autre facteur entre en compte : la majorité des nouvelles habitations construites au sein des villages le sont à proximité immédiate de l’emprise de la voie ferrée. Cette dernière, du fait de son abandon depuis plus de 25 ans, tend à disparaître petit à petit du paysage (végétation envahissante, enfouissement au gré des aménagements mineurs…). En certains endroits, à Biltzheim et Niederentzen en particulier, les clôtures des propriétés jouxtent l’emprise de la voie, voire la voie elle-même. A Niederentzen, la ligne se faufile, dissimulée par la végétation, entre un lotissement et la nouvelle école.


De tels aménagements signeraient-ils la fin de la ligne ? On ne peut pas s’avancer à cette conclusion, loin de là. En 2014, l’ingénieur suisse Markus Rieder, à l’occasion d’un projet de présentation de réouverture de la ligne franco-belge Givet ⇄ Dinant, présente plusieurs facteurs favorables à une réouverture de ligne. Parmi celles-ci, l’aménagement de quartiers et de services autour d’une voie ferrée. Les villages de la Hardt n’entraient pas dans ces conditions il y a 40 ans, les gares ayant été pour la grande majorité excentrées du village, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. De plus, le temps de la locomotive à vapeur étant révolu depuis un bon moment, les aménagements et matériels actuels permettent une cohabitation exempte de dangers et de nuisances entre lieux de vie et voies de communication ferroviaires.


Pour le moment, la ligne reste figée dans une léthargie parée pour durer. En 2006, l’étude menée par SNCF Réseau avait conduit à une préservation de l’emprise dans le but d’une utilisation future. Les maires des différentes communes avaient alors approuvé ce principe.


Les dés sont-ils relancés aujourd’hui ?


Au nord de Niederentzen, la voie, bien que toujours en place, a été enfouie. Elle se faufile entre le nouveau lotissement (rue du Schauenberg) et l'école primaire "Aux Quatre Vents" (au fond à droite). Photo prise le 14 octobre 2014.

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